samedi 4 février 2012

Janvier, le mois des « justes »

L’hiver a ceci de bon qu’il nous offre le temps de réviser nos classiques. S’y joignent les hasards du calendrier qui, avec beaucoup d’opportunité, nous y invitent également. Epiques ou héroïques, ces faits sont bien la matière qui donne au sport, et au cyclisme notamment, sa légende.

Albert Richter

Après une première diffusion sur Arte en début d’année 2010, la TSR diffusait un an plus tard l’excellent documentaire de Michel Viotte ("Albert Richter, le champion qui a dit non"). Ce documentaire, qui date de 2005 fait intervenir historiens et biographes et relate la vie d’un exceptionnel champion allemand de l’entre-deux guerres et la douloureuse réalité de l’époque.

Résistant à la montée du nazisme, n’hésitant pas à défier les autorités (il refusera systématiquement le salut nazi), refusant de se faire complice de la propagande et des manipulations dont faisait l’objet l’élite allemande, Albert Richter (1) apportera de plus un soutien inconditionnel à son entraineur juif, Ernest Berliner. Albert Richter entretiendra avec son entraineur une amitié inconditionnelle et des relations qui finalement lui couteront la vie. « Suicidé » par la Gestapo le 2 janvier 1940 suite à une interpellation à la frontière suisse.

Albert Richter est depuis devenu un héros du cyclisme allemand et l’une des figures emblématiques de l’exposition «Le sport à l’épreuve du nazisme» qui a lieu actuellement à Paris. Dans sa rubrique rétro, le mensuel «Vélo Magazine» de ce mois de février publie un très beau reportage sur la vie d'Albert Richter signé Raphaël Godet, collaborateur au journal «l’Equipe».

 Gino Bartali

Révélée par l’UCI fin janvier, la nouvelle a rapidement fait le tour de la planète cyclisme. C’est grâce à un travail universitaire suivi d’investigations menées par le fils de Gino Bartali (2), Andrea Bartali, et la journaliste Laura Guerra, que Gino Bartali devrait être distingué à titre posthume par l’Etat d’Israël de «Juste parmi les Nations» pour ses actions durant la seconde guerre mondiale.

Gino Bartali, dont faut il rappeler qu'il gagna trois Tours d’Italie et deux Tours de France à dix ans d’intervalle (1938 et 1948), mènera pendant la guerre des activités clandestines au service de la communauté juive d’Italie. Grâce à une certaine liberté d’action, il utilisera ses longues sorties d'entrainement pour cacher dans le cadre de son vélo documents et argent qui permirent à des juifs italiens de s’échapper en passant par la Suisse et à d’autres de survivre dans la clandestinité.

La presse s'est fait très largement l'écho d'un fait que Gino aura toujours gardé pour lui, ne laissant rien filtrer, même à ses proches. De nombreuses lectures sont disponibles dont l'excellent article "Gino le Juste" de Laurent Vergne disponible sur le site eurosport.com. Le quotidien Le Temps dans son édition du 2 février consacre une page entière à la nouvelle en y ajoutant des éléments historiques bienvenus sous la plume de Michaël Perruchoud (3).

________

(1) Albert Richter est l'un des plus grands coureurs cyclistes allemands de l'entre-deux-guerres. Alors que la machine nazie prend peu à peu le pouvoir en Allemagne, Richter reste fidèle à son entraîneur juif, Ernst Berliner, et prend tous les risques pour lui venir en aide. Richter est retrouvé mort le 2 janvier 1940.
(2) Gino Bartali est décédé à l’âge de 86 ans en mai 2000. La carrière sportive de Gino Bartali est systématiquement opposée à celle de Fausto Coppi (décédé le 2 janvier 1960 à l'âge de 40 ans) pour leur légendaire opposition dans la fin des années 40 et au début des années 50. Une rivalité qui fera bien plus que diviser l’Italie, la droiture de Gino « le pieux » contrastant avec les libertés prises par son jeune adversaire.
(3) Michaël Perruchoud a publié en 2008 aux Editions l'Age d'Homme un pamphlet (Bartali sans ses clopes).

Photo : Albert Richter avec son Manager Ernst Berliner (Photo Archiv W. Schoppe/Hall of Fame des deutschen Sports Radsport-Weltmeister und Nazi-Opfer).

    Aucun commentaire:

    Enregistrer un commentaire